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Quand mon âme vomit la beauté, le divin, Les chœurs harmonieux et la femme trop pure, Ma gourme la conduit par une sente obscure Vers la case aux relents de vanille et de vin.
Nu sur le lit m’attend le corps noir et puissant D’une esclave à l’œil las, délivrant sa chair veule. Sous sa bouche corail, frémit, se cambre et feule Une vestale juive au saphisme innocent.
Hanches et seins blafards, ventre et cuisses d’ébène Ne sont plus qu’un grouillis de stupre et de désirs. Ô temples entr’ouverts, ô (...)
24 octobre 2011, par Georges Flipo
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La chaleur devenait étouffante, une cloche tinta, des tourterelles s’envolèrent, et, les fenêtres ayant été fermées sur l’ordre du président, une odeur de poussière se répandit. Il était vieux, avec un visage de pitre, une robe trop étroite pour sa corpulence, des prétentions à l’esprit ; et ses favoris égaux, qu’un reste de tabac salissait, donnaient à toute sa personne quelque chose de décoratif et de vulgaire. Comme la suspension d’audience se prolongeait, des intimités s’ébauchèrent ; pour entrer en (...)
1er septembre 2011, par Marcel Proust
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Caryn me regarde, à moins que ce ne soit Maureen, je ne sais pas les distinguer, elle me fixe d’un œil mauvais car elle n’approuve pas ma réponse, alors qu’elle n’en aurait de toutes les façons pas plus approuvé une autre, quelle qu’elle fût. Mes filles rejettent et critiquent tout ce que je dis, me reprochant sans cesse qu’elles n’ont pas de père, par ma faute. Elles pensent que j’ai décidé qu’elles n’auraient pas de père, alors que je ne sais toujours pas comment j’ai pu tomber enceinte, et je n’ai aucune (...)
29 septembre 2011, par Franck Garot
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Ce fut au mois de juin, à Villeneuve-d’Ambeuse, un beau soir qu’il pleuvait. Il avait reçu la veille un sms sommaire lui expliquant de s’y rendre, pour un dîner qu’on imaginait plutôt « teuf ». La pensée qu’il la reverrait l’avait tenu éveillé toute la nuit, qu’il passa entre son lit, peuplé des rêves les plus tendres, et l’écritoire de sa chambre devant lequel il s’asseyait afin d’y consigner toutes sortes de secrets moins avouables. Alors qu’il dormait enfin, la lueur de l’aube illumina d’un coup le sol de la (...)
19 septembre 2011, par Xavier Garnerin
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Le ciel silencieux au fond de moi plongeait. Soudain, devant mes yeux, l’ombre mystérieuse D’un inconnu surgit. Sa forme harmonieuse Ravive en mon esprit un souvenir que j’ai.
Je m’imagine alors, corps tendu comme un arc, Mon amant d’autrefois, ami de Michel Ange Dont le corps d’ambre blond, et le visage d’ange Me hantent chaque nuit. Je le suis dans le parc.
C’est bien lui ! Quel bonheur ! Mon amour, mon grand maître Va s’élancer vers moi... Mais son trop long silence Résonne comme un glas, terrible (...)
22 septembre 2011, par MO
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J’étais arrivée en Cornouailles avec les enfants par le train du matin ; j’avais passé les deux heures du trajet le nez dans mon livre, de peur de croiser leurs regards mais, une fois sur le quai, je vis leurs trois paires d’yeux subrepticement traversées par l’ombre du regard noir de leur père. J’étais assaillie des souvenirs du pique-nique de l’année passée – le verre cassé, la nappe blanche maculée de vin, le ballon emporté par le courant du fleuve –, c’était le dernier été de James.
Ce ne fut pas ma (...)
26 septembre 2011, par Marianne Desroziers
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Ici on ne voit rien, ça a été voulu par l’artiste, vous comprenez. Clic-clac. Né en 1941 à Bergenstatten, regardant dès son plus jeune âge couvert dans son couffin d’une couverture acrylique bleu fluo les vaches brouter le bas du paysage d’un œil écarquillé, ferme à large toit bien au-delà des fenêtres, air pur même pour les marmottes, dans la brise comme un fumet de crottin et vzoum c’est parti, maman lui tartinait à même la huche son quatre-heures avec ce qui devint plus tard le Nutella, grand-père (...)
6 octobre 2011, par Xavier Garnerin
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Les rires clairs Flottent dans l’air Du printemps Gonflant mon cœur D’une vigueur De vingt ans.
Monte la sève Tandis que rêve Mon amant ; Je me souviens Des jeux anciens Et je mens ;
Et je me sauve À pas de fauve Pourchasser Ici et là Une belle à Embrasser.
10 octobre 2011, par Franck Garot
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Je suis né, j’ai vécu au sommet de ces tours Dont les néons blafards décolorent la nuit Et dont les ascenseurs en panne tous les jours Illuminent de tags les murs pourris d’ennui.
Les larsens vibraient seuls dans ces déserts figés. « Fuck you Sarko, hey mort aux keufs, niquez vos mères » Rappaient de grands lascars en panne de projet Coincés entre Reebok, RSA et les Frères.
C’est à l’hosto que j’ai clamsé dans le couloir Avec clodos, paumés, compagnons de panade, Tous les habitués des paniers à salade, (...)
17 octobre 2011, par Magali D.
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En mon jardin s’éveille un lilas redoutable Qui sent monter en lui une sève effroyable, Depuis qu’il a détruit mon mur haut de trois mètres. On saura de quel bois est fait ce nouveau maître ! Ravage et destruction, voilà de quoi il rêve. Fendons le globe, enfin ! Lézardons, et qu’on crève ! Moi peu m’importe au fond sa brûlante colère, Car je n’attends de lui qu’une ombre salutaire. Je m’endormis confiant sous sa grappe odorante : Il m’en punit d’un songe à la saveur sanglante. Je me vis en pêcheur, hissant (...)
20 octobre 2011, par Sylvie Lainé